L’Union des Comores, un archipel au large de la côte sud-est de l’Afrique, dispose d’un énorme potentiel de développement économique. Les Comores sont le premier producteur mondial d’huile essentielle d’ylang ylang, récoltent des épices, de la vanille et du clou de girofle. De plus, l’archipel a un potentiel incroyable pour développer davantage son industrie touristique.
En février 2023, les Comores ont ratifié le traité de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF – African Continental Free Trade Area). Le même mois, le président du pays, Azali Assoumani, a pris la présidence de l’Union africaine, plaçant le pays dans une position privilégiée pour faire avancer son développement.
Cependant, alors que le pays s’efforce d’améliorer son environnement des affaires afin de stimuler le développement économique, un plus grand pas en avant est nécessaire. Les différentes parties prenantes – y compris les secteurs public et privé, ainsi que la société civile – s’accordent à dire qu’il est nécessaire d’agir.
L’Agence Nationale de Promotion des Investissements des Comores (ANPI), une agence publique qui appuie les entreprises afin d’attirer des investissements, a sollicité l’assistance technique de la Facilité ICR pour aider à créer un environnement plus favorable des entreprises aux Comores.
En réponse, la Facilité ICR a travaillé aux côtés de l’Agence afin d’élaborer un Livre Blanc du climat des affaires aux Comores, qui comprend un certain nombre de recommandations pour l’améliorer, et un guide de l’after-care qui documente le processus par lequel l’ANPI communique continuellement avec les investisseurs et les aide à se développer et à réinvestir dans le pays.
Plaidoyer commun
Les entretiens réalisés pour le compte de la Facilité ICR ont confirmé qu’il était nécessaire de faire converger les différentes parties prenantes aux Comores afin de s’assurer que la direction à suivre était claire. Il était donc important d’impliquer tous les acteurs dans le processus d’élaboration du Livre Blanc.
Nadjati Soidiki, directrice générale de l’ANPI, explique que le Livre Blanc agit comme un « plaidoyer commun ».
« Ce rapport est un mégaphone pour mettre en avant le consensus – car il y a effectivement un consensus – qui ressort des entretiens avec toutes les parties prenantes. »
Confiance entre les secteurs public et le privé
La première étape de l’élaboration du Livre Blanc a été de passer en revue les nombreux rapports existants sur les affaires aux Comores qui ont été produits depuis 2007 ; la seconde a consisté à mener des entretiens approfondis avec 45 personnes représentant le secteur public, le secteur privé et la société civile.
L’un des principaux défis identifiés est le manque de confiance entre les secteurs public et privé. L’amélioration de cette relation est la principale recommandation du Livre Blanc, y compris la relance d’une plate-forme de dialogue public-privé, qui existe déjà en théorie mais n’a jamais été utilisée dans la pratique.
Le Livre Blanc recommande également d’aider les citoyens et citoyennes à se familiariser avec les cadres juridiques des entreprises, en proposant des formations ainsi qu’en disséminant des informations sur les dernières réformes, et de poursuivre la numérisation des procédures administratives.
L’une des principales recommandations est de promouvoir les Comores auprès des investisseurs étrangers. Etant donné que les entreprises locales ne génèrent que 11,6 % du PIB, le Livre Blanc identifie les investissements étrangers comme indispensables pour l’avenir. Il suggère également de développer une stratégie spécifique pour cibler les investisseurs de la diaspora. En effet, l’économie des Comores repose en grande partie sur les envois de fonds de ses citoyens et citoyennes vivant à l’étranger : les transferts de fonds de la diaspora comorienne se sont élevés à près de 232 millions de dollars en 2021, soit l’équivalent de 16,5% du PIB du pays, selon la Banque africaine de développement.
D’autres recommandations incluent le soutien aux exportations, en particulier dans le secteur agricole et l’accélération des initiatives environnementales – « l’économie bleue » présente un potentiel économique important pour l’archipel. Le soutien à des domaines tels que la gestion des déchets est également essentiel.
Les petites entreprises, les femmes et les jeunes
L’accès au financement est un défi pour les entreprises, les petites entreprises en particulier étant confrontées à des taux d’intérêt élevés et à un manque de disponibilité de prêts. Le Livre Blanc recommande la création d’un fonds de garantie pour permettre aux entreprises d’obtenir des prêts à plus long terme. Le rapport propose des programmes de formation pour aider les entreprises à élaborer un argumentaire d’investissement auprès des prêteurs.
Le Livre Blanc souligne également le potentiel inexploité des femmes et des jeunes. Les femmes ont tendance à faire face à tous les obstacles décrits dans le Livre Blanc de manière encore plus importante, et les femmes rurales sont confrontées à des défis plus importants parce qu’elles n’ont pas reçu la même éducation que les femmes qui ont grandi dans les villes. En outre, les jeunes sont confrontés à des taux de chômage élevés, avec plus d’un tiers des 15-35 ans qui ne travaillent pas et ne sont pas scolarisés.
Pour stimuler l’esprit entrepreneurial chez les femmes et les jeunes, le Livre Blanc préconise la création d’un fonds de garantie qui leur serait dédié. Il est également suggéré de lancer des programmes de soutien et de mettre l’accent sur la formation afin de combler le déficit de compétences dû à un système éducatif peu en phase avec les besoins réels des entreprises.
Madame Soidiki affirme que les femmes et les jeunes seront bien représentés à l’avenir et qu’un effort sera fait pour s’assurer qu’ils/elles bénéficient pleinement des recommandations du rapport.
Un potentiel illimité
Le Livre Blanc a été officiellement lancé en juin 2023. Il devrait alimenter la plateforme de dialogue public-privé et servir de base pour discuter des priorités en matière de réforme de l’environnement des affaires du pays.
Pour Nadjati Soidiki, le potentiel de développement économique des Comores n’a pas de limites, tout simplement parce que la marge de progression est énorme. « Lorsque nous parlons de promotion des investissements, tout ce qui peut apparaître comme une lacune est en fait une opportunité ».
« Un pays qui n’a pas d’électricité est une opportunité pour les entreprises du secteur de l’énergie ; un pays qui n’a pas de routes est une opportunité pour les entreprises du secteur des infrastructures, et ainsi de suite ». Peu de marchés dans le monde sont aussi « vierges » que les Comores, ce qui offre aux investisseurs de nombreuses possibilités de faire des affaires dans le pays, explique-t-elle.
Le pays s’est fixé des objectifs ambitieux en matière de croissance économique (visant à la doubler pour atteindre 7,5 % par an d’ici à 2030), de développement industriel et de stimulation de l’emploi. « Si les recommandations sont suivies, nous serons en mesure d’atteindre ces objectifs », affirme Madame Soidiki.
Le temps d'agir
Malgré la volonté d’améliorer la situation, l’un des problèmes rencontrés ces dernières années pour stimuler la réussite des entreprises aux Comores a été le manque de clarté quant à la question de savoir qui devait prendre la tête du changement.
L’ANPI semble parfaitement positionnée pour jouer ce rôle car c’est un intermédiaire clé entre le secteur public et le secteur privé.
Dans l’avant-propos du Livre Blanc, la directrice générale de l’ANPI écrit : « L’heure n’est plus aux observations ou aux recommandations, largement connues et partagées par tous. Le temps de l’action est venu ».
Le soutien aux jeunes entrepreneurs, et en particulier aux jeunes femmes, est une priorité pour les acteurs européens. La Facilité ICR et l’initiative Équipe Europe ‘Investir dans les jeunes entreprises en Afrique’ sont des exemples d’initiatives visant à résoudre certaines des contraintes auxquelles ils sont confrontés au quotidien.
Ressources additionelles
La Facilité ICR a soutenu la production de cette publication. Elle est co-financée par l’Union européenne (UE), l’Organisation des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (OEACP) dans le cadre du 11e Fonds européen de développement (FED), le ministère fédéral allemand de la coopération économique et du développement (BMZ) et le British Council. La Facilité ICR est mise en œuvre par la GIZ, le British Council, Expertise France et SNV. Le contenu de cette publication relève de la seule responsabilité de l’auteur et ne reflète pas nécessairement les opinions de l’UE, de l’OEACP, du BMZ ou des partenaires de mise en œuvre.